mardi 7 novembre 2017

D'ombre et de silence.
Karine Giebel.
Editions Belfond.
280 pages.
En librairie depuis le 19 octobre 2017.

Résumé:

« Partir sans lui dire au revoir. Parce que je le sens incapable d’affronter ses larmes ou de retenir les miennes. L’abandonner à son sort. Parce que je n’ai plus le choix. Je m’appelle Aleyna, j’ai 17 ans. Aleyna, ça veut dire - éclat de lumière. J’ai souvent détesté ma vie. Je n’ai rien construit, à part un cimetière pour mes rêves. Là au moins, on ne pourra pas me les voler. »

Mon avis:

Comme vous le savez sans doute je lis très peu de nouvelles. Ce n'est pas un genre que j'apprécie particulièrement parce que je trouve que les histoires qui nous sont racontées sont souvent trop brèves pour que j'arrive vraiment à m'en imprégner, et elles me laissent souvent un goût d'inachevé. Karine Giebel est une auteure que j'adore, j'ai déjà pu lire trois de ses nombreux romans ainsi qu'une de ses nouvelles dernièrement parue Aurore que j'avais  à mon grand étonnement beaucoup aimé. Elle est d'ailleurs à ce jour la seule auteure qui a réussi à me convaincre que certaines nouvelles peuvent être aussi construites et abouties qu'un roman. Je remercie donc les Editions Belfond pour avoir pensé à moi pour ce titre.

D'ombre et de silence est un recueil de neuf récits plus ou moins longs, mais qui tous ont su me captiver même si j'avoue avoir eu mes préférés. Ce sont des textes puissants qui se dévorent malgré la cruauté de certains des personnages qui sont pour la plupart torturés, malgré ces vies gâchées. On reste souvent estomaqué face à tant de désespoir et d'injustice. La force de ces histoires  repose sans doute sur le fait que Karine Giebel s'inspire de faits réels, d'actualités, de tragédies souvent évoquées à la télévision ou dans les journaux, autant de thèmes forts et marquants parce que l'on s'imagine que de tels actes se sont déjà produit et continuent à se produire autour de nous, comme le viol, le mariage forcé, le suicide, les tueries de masse, la prostitution, le harcèlement scolaire, les erreurs judiciaires, les attouchements sexuels, les accidents domestiques liés à la possession d'armes à feu, la maladie.

On y rencontre des personnes comme vous et moi mais qui ont à un moment de leur vie subi un traumatisme qui les a fait basculer dans la folie meurtrière, des assoiffés de vengeance, ou encore des personnes qui ayant touchées le fond n'ont plus d'autres choix que de vendre leur corps, ou de se donner la mort. Neuf nouvelles qui vous prennent aux tripes et qui je pense laisseront une trace indélébile dans mon esprit tellement elles sont touchantes et criantes de vérité. La beauté des mots de l'auteure presque poétiques nous font ressentir la folie de certains, leur désespoir, mais surtout la force avec laquelle chacun essaie de s'en sortir malgré tout.

L'auteure m'a ainsi inconsciemment amené à réfléchir sur la notion de pardon et sur le crime en lui-même. Peut-on réellement pardonner ? Peut-on éviter à un individu de se faire justice lui-même ? Peut-on oublier un traumatisme ? Ou engendre t-il forcément une vengeance personnelle ? Les actes de folie peuvent-il s'expliquer ? Résultent-ils forcément d'un individu en grande souffrance psychologique ? Ce titre n'est pas un coup de cœur parce que la chute de deux ou trois nouvelles à mon sens était attendue, mais j'ai cependant été stupéfaite par les autres qui m'ont laissé sans voix et qui me prouvent encore une fois le talent indéniable de Karine Giebel.

"Alban, il n'est pas tout à fait comme les autres. Mais qu'est-ce que ça veut dire, au juste?  Etre comme les autres... Entrer dans le moule, même s'il est trop étroit pour nous. Ne dépasser ni en hauteur ni en largeur, n'avoir aucun relief, aucunes aspérités que les autres pourraient saisir pour vous mettre à terre et vous rouer de coups. Une branche lisse, blanche si possible, et qui sait plier au vent. Etre comme les autres, ou considéré comme tel. Autrement dit faire semblant d'être comme eux, pour ne pas attirer l'attention."

Pour conclure:
Un recueil de nouvelles glaçant, des histoires fictives mais basées sur des faits d'actualités qui rendent encore plus effroyable ce que l'auteure nous raconte. Des personnages désespérés de part le passé douloureux qu'ils ont dû endurer ou de part l'enfer qu'ils vivent au quotidien qui ont su me toucher. Et une plume comme d'habitude sublime. Une réussite!

Ma note:  17/20.

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